Jaguar
SEPECAT

Jaguar E

Chasseur-bombardier biplace
d'entraînement air-sol avancé

Ce matin-là, j’étais leader d’une patrouille de 3 avions pour une mission sur le champ de tir de Yaka en Centrafrique ; le capitaine Jean-Loup RAMBEAU était mon N°2 et le Commandant TESTAUD mon N°3. Au retour de mission il était courant, voire d’usage de rentrer à Bangui en remontant le fleuve Oubangui à très basse altitude pour ne pas dire en « radada » ; pour ce faire, on s’est donc mis en colonne, moi devant suivi de RAMBEAU et TESTAUD. À une vingtaine de nautiques de Bangui, le fleuve s’élargit ce qui procure moins de repères et ce d’autant plus qu’il y avait de la brume comme souvent en Afrique. Tout est devenu marron, sans horizon, et puis, la fatigue et la chaleur aidant, je me suis assoupi, voire endormi comme on peut le faire en voiture sur autoroute. L’avion a continué à descendre et a touché l’eau. Heureusement, il était bien « trimé » et il a alors rebondi sur le bidon ventral et a parfaitement ricoché !

Le choc m’a bien évidemment réveillé et je me suis retrouvé miraculeusement à voler…. 

–        Jean Loup : « Henri !!! »

–        Moi : « Oui »

–        Jean Louis : « C’est quoi cette trainée dans l’eau ? »

–        Moi : « Je crois que j’ai touché »

Prise d’altitude, inspection par le n°2, sortie du train et des ½ volets ; tout fonctionne !

Je procède à un atterrissage de précaution et le retour au parking s’effectue sans passer chez les civils. Les mécanos qui m’accueillent font une drôle de tête en voyant l’avion.

Après le débriefing en salle d’OPS, c’est un retour sur le parking pour constater les dégâts. Ils sont moins importants qu’on aurait pu le penser : le bidon est écrasé et il y a quelques impacts sur le capot moteur à l’arrière. Après changement du bidon et des capots, le Jaguar sera remis en vol !

La soirée m’a couté un maximum en champagne qui était fort cher à l’hôtel où nous logions à Bangui, mais j’avais quand même la sensation que c’était passé très près et que je faisais du « rab ».

La sanction tombe : retour en France.

Un convoyage avait lieu à cette date et je suis rentré en C 135 via Libreville et j’ai été remplacé par le sergent-chef DUBOIS.

A l’arrivée, inutile de dire que j’ai dû aller m’expliquer à la 11ème Escadre et à la FATAC… J’ai raconté que j’avais eu des fumées dans la cabine, que ma carte était tombée, que j’étais un peu fatigué, que la météo, … bref, que des bonnes excuses. Sanctionné de 10 points négatifs et de quelques jours de mise à pied, j’ai repris les vols au IV/11 dès le début du mois de mars.

En fait, je me suis bien endormi. J’étais effectivement bien fatigué, une fatigue due à la vie du détachement : la chaleur, l’humidité, beaucoup de sport pour ma part, quelques sorties le soir et des mauvaises nuits.

Le bidon d’Henri après son surf sur l’Oubangui…